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Interview d'Elie Jolliet par Nayoung Kim Millius, avril 2023

Pourriez-vous nous raconter votre rencontre avec l’orgue? Comment avez-vous décidé de poursuivre le chemin de musicien professionnel?

J’ai été initié à la musique en début d’école primaire par des cours de flûte à bec. Ensuite j’ai débuté avec le piano à l’âge de 9 ans, plus tard s’est ajoutée la clarinette. Bien que j’aie grandi dans une famille qui allait régulièrement à l’église, l'orgue ne m'a pas particulièrement intéressé en premier. Un jour, un ami de la famille m’a fait un cadeau d’orgue de travail et on m’a proposé de jouer de l’orgue dans une messe. C’est à ce moment-là le tournant majeur. J’avais alors 15 ans et suis très vite tombé amoureux de cet instrument ! J’ai ensuite commencé à prendre des cours d’orgue. Avec ma maturité en poche, plusieurs chemins m’auraient intéressé, mais pas question de choisir une autre voie que celle de la musique sans beaucoup réfléchir à ce que cela impliquait pour mon avenir professionnel plus tard.

Quelle est la plus grande beauté de l’instrument pour vous?

Pour moi, la beauté de l'orgue se trouve dans sa diversité : chaque instrument est unique, conçu pour le lieu dans lequel il sonnera. Tous les instruments ne sont pas de même qualité d’excellence ou ne se marient pas parfaitement avec l’acoustique dans laquelle ils se trouvent, mais cela ne fait rien. Je réussi toujours à trouver un “registre”, un timbre de son, qui me touche particulièrement – par exemple une Flûte* qui chante ou une Anche* qui ronronne – ou un mélange unique qui appelle à la créativité.

*Nom de registre (timbre de son) d’orgue

Dites-nous un peu sur votre programme pour le concert AOA, il a un sens particulier que vous voudriez transmettre au public?

Quand j’ai suffisamment de temps pour visiter l’instrument du lieu de concert à l’avance, j’aime bien faire connaissance avant de choisir mon programme. J’ai d’abord pu visiter l’Auditoire de Calvin et passé une matinée à l’orgue du facteur Aubertin quelques semaines avant de déposer mon programme. J’y ai essayé plusieurs pièces de nombreux compositeurs avec diverses registrations*, en écoutant la manière que cet orgue sonne dans l’église. Il m’est aussi important de prendre le temps afin de trouver des styles ou pièces qui me permettent de me sentir le plus à l’aise sur l’instrument et de décider pour les palettes sonores qui me plaisent le plus. Finalement, j’ai choisi Bach pour le fil rouge de mon programme. La musique de Bach me tient particulièrement à cœur. C’est un compositeur qui offre tellement de styles et genres variées que j’ai essayé de concocter un programme qui permettrait de présenter cette richesse de diversité sur les plus nombreuses facettes possibles.

*Registration : choix de combinaison de jeux pour un passage, dans le jeu d’orgue

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Quelle est votre opinion sur le rôle des organistes et des musiciens pour les jeunes générations? Quels seraient, à votre avis, les impacts de vos activités musicales?

Pour moi, la musique et la culture en général offrent de la qualité de vie : par des moments de détente, des émotions, des questions et même de la perplexité qui se pose, de la stimulation intellectuelle – mais aussi et surtout par l’aspect social quand on assiste à un concert ou en jouant de la musique avec d’autres personnes.

C’est ce que je constate lorsque je dirige un chœur, un groupe de personnes de différentes origines, intérêts, croyances, situations familiales, philosophies de vie etc. mais tous réunies dans l’envie de chanter ensemble. Cela suffit pour les unir. Cela ne ferait sans aucun doute pas de mal si les hommes et femmes de politique  prenaient le temps de chanter ensemble de temps à autre! En faisant de la musique ensemble, on apprend à connaître à la fois l'importance de sa propre voix et celle de l'interaction qui leur permet de vivre ensemble. Ceci dit, je me réjouis particulièrement de jouer à l’Auditoire non pas caché sur une tribune, mais en contact visuel avec le public : cela m’aide de voir les spectateurs aussi et d’être en contact avec les gens pour qui je joue – et cela rend bien sûr le concert plus attirant pour le public, ce qui est n’est pas toujours possible sans passer par transmission sur grand écran. Durant ces dernières années, j’ai beaucoup pu travailler avec les enfants de la paroisse dans le cadre de mon poste de Cantor (Chef de musique d’église) dans les environs de Berne. Souvent, il suffit de les écouter et de se mettre à leur place pour trouver un véritable moment de convivialité. La médiation culturelle est aussi un très bon moyen pour multiplier ces expériences, notamment en passant par des projets de plus grande ampleur.

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Un dernier mot pour le public du Festival Souffle de Printemps ?

Bach est immortel et sa musique intemporelle !